Après son envoûtant "Où bat le cœur du monde", Philippe Hayat signe un troisième roman plein de bruit et de fureur. "La loi du désordre" évoque la période de bascule qui court de juillet à septembre 1914 où le monde entier entre dans le premier confit mondial. "Pourquoi ont-ils tué Jaurès ?" chantait Brel ; dans le roman, c’est Jeanne qui travaille auprès du grand homme et qui le hurle à gorge déployée. Cette dernière, féministe au tempérament bien trempé et fille de patron d’industrie, doit protéger son frère fragile face aux dérèglements des temps. Elle partira au front pour retrouver le régiment de Charles en tant qu’ "ange blanc". L’occasion de lire des pages merveilleuses sur cet été 14, mais aussi sur cette Bataille de la Marne héroïque. Des faits peu connus viennent aussi sous la plume de l'Auteur. Philippe Hayat ne se contente pas de faire revivre l’Histoire : il compose par petites touches un portrait coloré et vigoureux de son héroïne, il évoque l’amour fraternel comme peu d’écrivains savent le faire.

Découvrez ce roman à la lisière de l'effondrement du régime de Napoléon III et de la révolte de la Commune de Paris. Vous y retrouverez le peintre Auguste Renoir et le révolutionnaire Raoul Rigault. Une amitié d'acier s'est nouée entre eux lorsque le second est pourchassé par les hommes du régime impérial finissant et que Renoir le cache. Rigault n'hésitera pas à sauver le peintre lorsque la Commune échauffera les esprits... Bref, l'un peint le monde ; l'autre le renverse... Un roman touchant porté par une très belle écriture. Un sujet original et poignant lui aussi.

Toute ressemblance avec notre monde n'est pas fortuite... Dans ce roman dystopique d'une France pas si loin de nous, Simon Kaas est troll au service d'un gouvernement populiste. Il passe son temps à dégommer tout ce qui bouge (encore) sur Internet. Par le truchement des archives notamment, il va devoir enquêter sur son père, historien au service de la Vérité dans un monde qui ne l'accepte plus. Ce dernier a exhumé la preuve (fait nié depuis) de l'existence d'un camp de prisonniers dans le Sud de la France lors de la Seconde Guerre mondiale. Un roman qui nous emporte dans son labyrinthe et qui nous émeut par la puissance des personnages et des situations... Les passages narratifs dans les entrailles de la Bibliothèque nationale évoquent les plus beaux romans de l'absurde de Franz Kafka. Ils sont savoureux mais doivent, avant tout, nous réveiller !!!

Attention livre-choc ! Une nouvelle voix s'élève, puissante, dans la littérature américaine contemporaine. "Arpenter la nuit", publié dans la collection Terres d'Amérique qui nous avait donné récemment l'époustouflant "Ohio" de Stephen Markley, raconte la descente aux enfers d'une jeune femme noire ayant juste quitté l'adolescence et obligée de se prostituer pour survivre. C'est corrosif, c'est sombre. Mais c'est surtout décrit par une formidable conteuse ; une poétesse et primo-romancière sans concession.

Laissez-vous happer par ce qui ressemble à un road-movie, laissez-vous happer par cette "Lincoln Highway" qui constituera pour Emmet Watson, dix-huit ans et quinze mois passés dans un centre de détention pour mineurs, une longue cavalcade semée d'embûches. La mort de son père ruiné après la guerre et la nécessité de quitter la ferme rachetée par la banque obligeront notre héros à foncer direction la Californie. Go west ! Le roublard Duchess et son acolyte Woolly composeront avec son jeune frère de huit ans Billy, un équipage qui n'en fait qu'à sa tête. N'empêche que c'est très beau et qu'on a l'impression de lire les aventures d'un nouvel Ulysse. Passionnant !