PLUME DE STARS, 3000 chansons et quelques autres
EAN13
9782809801385
ISBN
978-2-8098-0138-5
Éditeur
Archipel
Date de publication
Collection
ARTS ET SPECTAC
Nombre de pages
264
Dimensions
10 x 10 x 2 cm
Poids
366 g
Langue
français
Code dewey
782.421
Fiches UNIMARC
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Plume De Stars

3000 chansons et quelques autres

De

Archipel

Arts Et Spectac

Indisponible

Autre version disponible

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DU MÊME AUTEUR

L'Art d'écrire une chanson, Eyrolles, 2007.

Puisque tu veux tout savoir ! Confidences à Julien Dassin, Albin Michel, 2005.e9782809802733_i0001.jpg

Avec le soutien de la Fondation d'entreprise La Poste.

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ISBN 978-2-8098-0138-5

Copyright © L'Archipel, 2009.

Sommaire

DU MÊME AUTEUR
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Prologue
1

Prologue

Je somnole au fond de l'Airbus. Un instant de quiétude au-dessus des nuages. Les moteurs ronronnent déjà plus doucement. Nous descendons vers Calvi. Dans ma mallette, mon cahier, compagnon permanent, et mon dictionnaire de rimes, plus intermittent mais parfois utile. Les hôtesses ont ramassé les verres en plastique et les sachets d'amuse-gueule. Au loin apparaissent le liseré bleu de la côte et le chapeau blanc des montagnes.

Dans une heure, je m'installerai devant une montagne bien plus blanche encore, une page que j'essaierai de gravir avec des mots, des idées, des ratures, doute après doute, rime après rime, avec un Bic ordinaire et le souci de ne pas l'être trop. Je suis parti en Corse pour travailler. Je suis auteur de chansons. Plume de stars...

Michel Fugain m'attend à l'aéroport. Après une accolade chaleureuse, son 4 × 4 démarre vers L'Île-Rousse. Nous sommes heureux de nous revoir. Trente-cinq années d'amitié ont tissé entre nous des liens fraternels et solides. On plaisante, on échange, on savoure les retrouvailles... Une longue collaboration dans le monde si souvent décrié du show-business ne va jamais sans une profonde intelligence des cœurs.

Nous arrivons chez lui. La Méditerranée a mis son bleu d'accueil. Je m'installe et le rejoins rapidement – car j'ai hâte, comme lui, d'écrire – dans ce salon où nous attend l'ordinateur à qui il a confié ses musiques.

On commence à écouter... Une mélodie superbe. J'ai la chair de poule. Et Michel me regarde avec des yeux remplis d'enfance :

— Claude, me dit-il, tu te rends compte ? Nous aurons vécu toute notre vie avec des chansons !

Je ne réponds pas. J'y songe. Il a raison, Michel... Quelle chance improbable, inouïe... C'est vrai qu'il n'est pas un matin où je ne remercie la providence du privilège qu'elle nous a offert, à lui, à moi comme à quelques autres : vivre toute sa vie avec des chansons !

1

Je suis entré au « Petit Conservatoire de la chanson » de Mireille grâce à un étrange concours de circonstances. J'avais dix-neuf ans et j'étais élève de +khâgne1 au lycée Henri-IV. Comme j'avais choisi l'internat afin de mieux travailler (grave erreur !), mes condisciples – j'avais eu la faiblesse de leur avouer que j'écrivais des chansons – m'avaient engagé à apporter ma guitare, afin d'agrémenter nos « longues soirées d'automne »... En fin d'après-midi, pendant l'étude, une poignée de camarades plus friands de Brel que de Tacite applaudissait mes interprétations poussives du Grand Jacques, parmi lesquelles je glissais, de temps en temps, quelques-unes de mes propres compositions. Pendant mon « récital » quotidien, les élèves sérieux planchaient sur Montaigne ou Kant en maudissant, sans doute, le perturbateur qui s'égosillait dans la salle voisine... La pauvre infirmière qui, elle, officiait à l'étage au-dessus supportait stoïquement les braillements du barde, mais mon petit public, d'une indulgence ou d'un manque de clairvoyance très supérieurs à la moyenne, encourageait mes premiers essais :

— C'est génial, me répétaient mes camarades, tu devrais montrer tes chansons !

Cela me flattait, sans trop me convaincre. Un jeudi de novembre 1964, cependant, mes deux ou trois « fans » réussirent à m'entraîner du côté de la Maison de l'ORTF2. L'un d'eux me dit :

— Il y a un concours, dimanche, à la télé. Il faut chanter des chansons de Brel. Tu dois t'inscrire !

Nous faisons le chemin à pied de la rue Clovis, dans le Ve arrondissement, à l'avenue du Président-Kennedy. Sur les bords de Seine, je n'en mène pas large... Mes copains, eux, sont ravis ! Arrivés sur place, ils se renseignent. L'audition a lieu le samedi matin suivant, 9 avenue Hoche, aux studios Barclay : là où le grand Belge et tant d'autres enregistrent !

Ne voulant pas décevoir mes supporters – et quelque peu coincé –, je me présente au jour dit, au lieu dit, à 9 heures du matin et me fends, parmi deux cent trente postulants, d'un « Jef » approximatif, accompagné de ma seule guitare (ceux qui connaissent la chanson et la somptueuse orchestration de François Rauber imaginent ce que ça pouvait donner !). Un jeune directeur artistique, sans doute mal réveillé, vient me trouver et me dit :

— Pas mal, pas mal du tout... Vous serez sans doute retenu, mais si vous l'êtes, je vous en prie, demain, rasez-vous !

Surpris par ces compliments, mais un peu vexé car j'ai confié le matin même ma jeune barbe à Gillette, je m'attends, contre tout pronostic, à figurer parmi les privilégiés qui vont être sélectionnés. Illusion ! À midi et quelque, Guy Lux, le producteur du « Jeu de la chance », égrène six noms... mais pas le mien !

Je rentre donc à Henri-IV rassuré sur mon absence de talent et persuadé que, si je dois faire un choix qui engage mon avenir, ce sera entre les études... et les études.

— Alors ? m'interpellent gaiement mes aficionados khâgneux. Tu es pris ?

— Non, je l'ai cru, mais je ne fais pas l'émission.

Je raconte : « Jef », le directeur artistique, Guy Lux...

— C'est dégueulasse, répondent-ils, tu étais le meilleur...

Évidemment, ils n'ont pas eu besoin d'entendre les autres pour en être convaincus !

Le samedi, les internes déjeunaient au bahut. La cantine, en gros, valait moins trois étoiles. Nous avions affublé le cuisinier (ou l'intendant, je ne sais plus trop...) du joyeux sobriquet de « Piédalu » et nous le gratifiions régulièrement de gracieusetés hurlées en chœur telles que :

Piédalu, si tu continues,
Tu seras pendu
Par la peau des fesses.
Piédalu, si tu continues,
Tu seras pendu
Par la peau du...

(Le lecteur cultivé aura, bien sûr, deviné le dernier mot du refrain !) Mais, ce samedi-là, pas de mazarinade culinaire. Une fois le repas expédié, mon ami Gérard Gaillaguet me dit : « Allons prendre un café. » Le ton, péremptoire, ne souffrant pas de refus possible, je l'ai suivi...

Nous descendons la rue du Cardinal-Lemoine (qu'a-t-il fait, celui-là, pour mériter une rue3 ?), puis, à ma grande surprise, mon condisciple dévale, d'un air de plus en plus décidé, les marches de la station de métro du même nom (il a aussi une station de métro !...), va rapidement acheter un jeton de téléphone à la caisse, se dirige vers la cabine, compulse le Bottin, décroche :

— Allô, Cognacq-Jay ? Passez-moi Guy Lux, s'il vous plaît... (je suis vert... un silence...) C'est personnel... (je suis blême... un long silence...) Allô ? Oui, bonjour, monsieur Guy Lux. Je m'appelle Claude Lemesle (là, je vire à l'écarlate...). J'ai été, ce matin, victime d'une scandaleuse injustice. On m'avait affirmé que je serais retenu pour votre émission et je ne l'ai pas été... On sait ce que c'est que la télé, magouille et compagnie. Vous allez entendre parler de moi !

Un autre silence, puis :

— Très bien, on fait comme ça... C'est d'accord, à demain !

Abasourdi, tremblant, en remontant les marches du métro Cardinal-Lemoine (tiens, on a les mêmes initiales ! Un signe ?...), j'interroge Gérard :

— Qu'est-ce qu'il t'a dit ?

— Il m'a dit qu'il ne comprenait rien à mon histoire, qu'il n'avait pas le temps parce qu'il était en train de répéter avec Jacques Brel. Il m'a demandé de venir demain à 10 heures avec les six autres candidats pour qu'on s'explique. À toi de jouer, maintenant...

Me voilà donc obligé, le lendemain matin, de reprendre mon rôle, tenu un instant par mon ami Gaillaguet, et de me présenter à la répétition. J'arrive à 10 heures pile. Guy Lux se précipite vers moi (comment m'a-t-il reconnu ?) :

— Monsieur, je n'ai toujours rien compris à ce q...
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