La mort de Jean-Marc Roberts

Jean-Marc Parisis

Table Ronde

  • 25 mars 2014

    "Mes livres semblent tellement légers que je finirai par m'envoler avec eux".

    Depuis quelques mois, je note des dédicaces à l'attention de Jean-Marc Roberts. Dans les textes de Laurence Tardieu et de Nina Bouraoui, pour ne citer qu'elles. J'étais curieuse de connaître cet homme qui semble avoir profondément marqué une génération d'auteurs.

    J'ai lu Les Aimants de Jean-Marc Parisis avec beaucoup de plaisir et je tenais à découvrir son dernier opus. A mi-chemin entre la biographie et l'essai, Jean-Marc Parisis évoque le parcours de l'éditeur, ses débuts d'écrivain et sa relation toute particulière avec ses auteurs.Il avait pour habitude de prendre la défense de l'auteur contre la machine éditoriale. Cette relation était passionnelle alors que l'édition est régie par d'autres rapports. Grâce à Jean-Marc Roberts, l'écrivain devait travailler à se rendre voyant, mais pas voyant de soi.

    "Le corps des gens ne fait pas grand-chose, mais leur esprit d'inverti qui ne vit que du corps des autres ne se lasse pas de circuler." Antonin Artaud.

    Au delà de l'hommage à l'homme, Jean-Marc Parisis évoque la représentation sociale du livre depuis trente ans. Sous couvert de dresser le portrait de l'homme complexe et multiple tel un personnage de roman, Parisis relate le marché du livre confronté à la crise depuis les années 80. Roberts c'est l'homme-livre, l'homme-libre avec une âme de gitan, "celui qui roulottait d'appartement en appartement, qui changeait d'éditeur comme de camp, qui chantait la bonne aventure aux auteurs, qui dansait en portant sa maison sur son dos, avait une âme de gitan dans un pays de culs plombés."

    Peu sensible aux querelles éditoriales autour de certaines publications, je retiens surtout dans les mots de Parisis, le portrait de cet homme proche de Modiano tour à tour dans la fuite, l'évitement, dans ses doutes et ses hantises.

    "Les cloches de la rentrée littéraire sonnent dès la troisième semaine d'Août. Et l'on voit débouler le guignol frisé sentimental, la féministe "déjantée", la vieille poupée touillant le yaourt du roman familial, le génie des provinces et son premier roman sous le bras, le post-ado surdoué, le baroudeur de cartes postales, toute la marmaille. Certains redoublent, retriplent sous des couvertures différentes."

    Editions La Table ronde, Octobre 2013.